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Ordonnance du 6 novembre 2024 : ce qu’elle change pour les influenceurs
L'Ordonnance n°2024-978 du 6 novembre 2024 (« l’Ordonnance ») vient modifier la Loi n°2023-451 du 9 juin 2023 (« la Loi ») encadrant l’activité des influenceurs afin de la mettre en conformité avec le droit européen suite aux observations de la Commission Européenne.
La définition de l’influenceur reste inchangée : les influenceurs sont des « personnes physiques ou morales qui, à titre onéreux, mobilisent leur notoriété auprès de leur audience pour communiquer au public par voie électronique des contenus visant à faire la promotion, directement ou indirectement, de biens, de services ou d'une cause quelconque exercent l'activité d'influence commerciale par voie électronique. »
Quels sont les principaux changements impactant directement le quotidien des influenceurs dans l’exercice de leur activité ?
- Clarification des sanctions des promotions interdites par la Loi
L’Article 4 de la Loi du 9 juin 2023 prévoyait déjà de nombreux secteurs pour lesquels toute promotion directe ou indirecte par des influenceurs était interdite. Plusieurs sanctions sont prévues par la loi :
- 🚨 Pratiques commerciales trompeuses (Art. L.132-2 du Code de la consommation) : 5 ans de prison et 750 000 € d’amende (et jusqu'à 3,75 millions d'euros pour les personnes morales). ⚠️ Cette sanction spécifique aux pratiques commises en ligne est récente, en vigueur depuis le 12 mai 2024. ⚠️
- 💰 Amende pouvant atteindre jusqu’à 100 000 € (Art. L.226-16-1 ; Art. L.226-16-2 du Code de la consommation ; Art. L.324-8-1 du Code de la sécurité intérieure, selon les situations).
- 🚫 Peine complémentaire d’interdiction définitive ou provisoire d’exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise ou l'activité d'influence (Art. L.131-27 du Code pénal)
Le tableau ci-dessous illustre la répartition des différentes sanctions en fonction des promotions et pratiques incriminées :
- Assouplissement des obligations liées aux mentions sur les images et contenus promotionnels
Alors que la version initiale de la Loi prévoyait un Article 5 unique concernant les mentions L’Ordonnance modifie les obligations en matière de transparence pour les influenceurs, répartissant désormais ces exigences en deux articles distincts :
a) Images retouchées / images virtuelles
Aux termes du nouvel Article 5-I de la Loi, les contenus publiés par les influenceurs comprenant des images modifiées afin d’affiner ou épaissir la silhouette, ou de modifier l’apparence du visage doivent être accompagnées de la mention « Images retouchées ».
Les contenus publiés par les influenceurs comprenant des images générées par une IA afin de représenter un visage ou une silhouette doivent être accompagnées de la mention « Image virtuelles ».
💡 Apports de l’Ordonnance :
- Les mentions peuvent être adaptées aux caractéristiques de l’activité d’influence et au format utilisé par l’influenceur, sous réserve d’équivalence.
- L’obligation d’afficher ces mentions « durant l’intégralité du visionnage» est supprimée, mais celles-ci doivent toujours apparaître de manière claire, lisible et compréhensible, quel que soit le support utilisé par l’influenceur.
Un décret pris en Conseil d’État reste attendu concernant les modalités d’application de l’Article 5 dans sa nouvelle rédaction.
⚠️ Sanction : un an d’emprisonnement et 4500 euros d’amende.
b) Indication de l’intention commerciale
L’intention commerciale poursuivie par l’influenceur doit être indiquée de manière claire, lisible et compréhensible, sur tout support utilisé dans le cadre de l’exercice de son activité d’influence. Cette intention peut être explicitement indiquée par le recours aux mentions « Publicité » ou « Collaboration commerciale ».
💡 Apports de l’Ordonnance :
- L’indication de l’intention commerciale peut être faite par une mention équivalente adaptée aux caractéristiques de l’activité d’influence et au format du support de communication utilisé.
- L’obligation d’afficher ces mentions « durant l’intégralité de la promotion» est supprimée, mais celles-ci doivent toujours apparaître de manière claire, lisible et compréhensible, quel que soit le support utilisé par l’influenceur.
⚠️ Sanction : 5 ans de prison, 750 000 € d’amende pour les personnes physiques et jusqu'à 3,75 millions d'euros pour les personnes morales (nouvelle sanction des pratiques commerciales trompeuses commises en ligne).
🎯 En pratique ?
- ✅ Souplesse dans le choix des mentions: L’Ordonnance permet aux influenceurs d’adapter les mentions obligatoires (« Images retouchées », « Images virtuelles », « Publicité », « Collaboration commerciale ») en fonction de leur activité et du support utilisé, tout en restant conformes à la Loi. Le champ lexical devrait cependant demeurer assez restreint mais on imagine que des mentions telles que « contenu généré par IA », « visuel graphiquement modifié », « Sponsorisé par » ou « Partenariat rémunéré » seraient des mentions conformes à l’objectif de la Loi.
- ✅ Durée d’affichage des mentions: Bien que les mentions n’aient plus à être visibles pendant toute la durée d’une promotion, il reste conseillé de les afficher aussi longtemps que possible, surtout pour les vidéos ou les contenus éphémères comme les stories. Pour les publications permanentes, la question de la durée est moins problématique mais nécessite une vigilance similaire.
- ✅ Utilisation des outils natifs des plateformes: Les bannières proposées par des plateformes comme Instagram (ex., « Collaboration commerciale) » permettent de répondre facilement aux obligations légales. Même si elles ne sont plus obligatoires tout au long de la promotion, maintenir leur affichage complet reste une solution pratique et conforme, évitant les complications liées au calcul d’une durée minimale.
- ✅ Visibilité des mentions: Les mentions telles que « Publicité » ou « Collaboration commerciale » doivent être clairement visibles, sans être masquées par d’autres éléments visuels (e.g., musique, filtres ou autres textes). Assurez-vous que leur lisibilité est intacte sur tous les supports, notamment pour les stories.
- Autres points modifiés par l’Ordonnance
L'Ordonnance apporte également des modifications à la Loi pour :
- Garantir le respect du principe du pays d'origine, conformément aux exigences de la directive e-commerce et de la directive 2010/13/UE du 10 mars 2010 relative aux « services de médias audiovisuels » (SMA), tout en précisant les exceptions à ce principe, applicables dans le cadre des procédures dérogatoires prévues par ces directives ;
- Détailler les conditions liées à l'Article 9 de la Loi, qui concernent la désignation d'une personne morale ou physique chargée de représenter sur le territoire de l'Union européenne les acteurs exerçant une activité d'influence commerciale visant un public en France, lorsqu'ils sont établis en dehors de l'Espace économique européen et de la Suisse. Cet article précise également l'obligation pour ces acteurs de souscrire une assurance responsabilité civile professionnelle dans l'Union européenne.
Le cadre juridique entourant les influenceurs continue d’évoluer rapidement, imposant des obligations de plus en plus précises. Pour sécuriser leur activité et éviter des sanctions lourdes, il est essentiel que les influenceurs soient accompagnés par des professionnels du droit afin d’anticiper les risques et respecter les nouvelles exigences légales. ⚡🚀